Crimes à la librairie
anthologie dirigée par Richard Migneault
Éditions Druide, 2014.

Passionné de polars, l’anthologiste Richard Migneault (notamment animateur du blogue Polar, noir et blanc) a eu l’idée de cet ouvrage après avoir constaté que les polars québécois méritaient davantage de visibilité. Il a donc approché 16 auteurs autour du thème « Crimes à la librairie » et les éditions Druide pour prendre part à ce projet aussi ambitieux qu’original. Son enthousiasme a été communicatif : presque tous les auteurs ont accepté de prendre part à l’anthologie. Ce collectif propose un sommaire particulièrement alléchant, regroupant des nouvelles de Mario Bolduc, Camille Bouchard, Benoît Bouthillette, Chrystine Brouillet, Jacques Côté, Ariane Gélinas, André Jacques, Martine Latulippe, Geneviève Lefebvre, Florence Meney, Sylvain Meunier, Martin Michaud, Patrick Senécal, Johanne Seymour, Robert Soulières et Richard Ste-Marie.

Quelques textes se démarquent, entre autres les nouvelles autonomes, qui ne s’inscrivent pas en « annexe » de l’œuvre de l’auteur. Les récits brefs fraient parfois avec d'autres genres ou tonalités, comme le fantastique (Senécal) et l’humour (Meunier, Bouchard), ce qui confrère à l’anthologie une intéressante variété.
Parmi les textes à signaler, mentionnons « Le libraire et l’enfant » de Martine Latulippe, qui a récemment fait paraître, aussi chez Druide, le recueil de nouvelles policières, Les faits divers n’existent pas. Dans ce texte bref, l’écrivaine emploie une narration distanciée, qui a pour étonnante conséquence de rendre son histoire - au centre de laquelle se trouve un jeune garçon qui vit littéralement dans une librairie - encore plus poignante et touchante.

Robert Soulières présente, quant à lui, une nouvelle prenante, « Un cadavre au Crépuscule », qui se déroule lors d’un lancement auquel participe un écrivain vedette, Geoffroy Lanuie, et l’auteur véritable derrière ses livres, Clément Martin. Ce dernier supporte de plus en plus difficilement de demeurer dans l’ombre de son alter ego. L’ensemble est bien mené, rythmé et surprenant.

La nouvelle « Perinde ac cadaver » d’André Jacques est une autre des belles surprises de l’anthologie, narrée avec talent. Nous y rencontrons deux vieux associés, Morel et Berthier, qui gravitaient autour de l’Organisation, avant que Berthier ne se recycle en propriétaire de librairie. L’ensemble se révèle étonnant et maîtrisé, et les personnages sont bien campés.

Autre coup de cœur du recueil, « Le palmarès », de Richard Ste-Marie. Ce texte bref et ingénieux met en scène l’enquêteur fétiche de Ste-Marie, Francis Pagliaro, qui s’intéresse ici à des squelettes trouvés dans le sous-sol d’une librairie... Ainsi qu’à l’étrange palmarès du titre. À lire !

Au-delà de sa collaboration à notre émission, mentionnons enfin la nouvelle d’Ariane Gélinas pour son audace, son travail stylistique et son approche personnelle du genre.

Bref, Richard Migneault a plus que réussi sa mission avec Crimes à la librairie, qui promet d’être un incontournable du polar québécois. C’est une occasion à ne pas manquer de découvrir des auteurs pratiquant le genre au Québec ou de redécouvrir certains écrivains plus connus qui figurent au sommaire. En somme, une belle initiative de la part de l’anthologiste et des éditions Druide.

chronique de Frédérick Durand
lundi 7 avril CFOU/( Trois-Rivières) /Le voyage insolite